Confinement : « Les mamans vont être plus vulnérables à cause de l’isolement »

Psychologue clinicienne spécialisée en périnatalité depuis bientôt 10 ans, Dalila Pilot a accepté de répondre aux questions du Quatrième trimestre sur le confinement et ses conséquences psychologiques sur le nouveau-né et les jeunes parents.

Le confinement, peut-il avoir un impact sur la santé mentale des jeunes mères ?

Quelles sont les conséquences du confinement sur un nouveau-né ? Est-ce que cela se ressentira sur sa sociabilité ?

« Je vous rassure, cela n’aura aucune conséquence sur son développement. Pour les tout-petits (jusqu’à 6 mois) les interactions primordiales sont celles avec ses parents. C’est un moment privilégié pour découvrir et construire les liens d’attachements primaires. Donc le bébé ne va pas souffrir du confinement.»

Le fait de ne pas avoir d’interactions extérieurs ne peut pas le perturber ?

« Au tout début, cela n’aura pas d’impact sur son développement social. A partir de 5, 6 mois l’enfant est davantage dans les observations, il va demander plus d’interactions donc ça sera peut-être un peu plus difficile, surtout si le projet est de le mettre en crèche ou chez une assistante maternelle par la suite.»

Que faudra-t-il faire alors ?

« Il faudra faire les choses de manière progressive, introduire de nouvelles personnes et être attentif à ses réactions. Le mettre à la crèche très progressivement avec un temps d’adaptation plus long par exemple. Une adaptation nécessaire aussi bien pour le bébé que pour la maman.»

Pour les mamans qui accouchent en période de confinement, y-a-t-il un risque plus accru de dépression post-partum ?

« Je pense que tout dépend du vécu de chaque maman, de son histoire et de sa fragilité émotionnelle. Peut-être que ces mamans seront plus vulnérables à faire un baby-blues. La dépression du post-partum est beaucoup plus lourde et concerne des femmes qui ont un vécu psychologique plus difficile ou une plus grande sensibilité/ fragilité. Le baby-blues peut toucher la majorité des femmes, 3,4 jours après l’accouchement dû à la chute hormonal : on va beaucoup pleurer, ressentir un sentiment d’incompétence et ressentir un mal être-être. Lors du baby-blues, l’entourage est important pour apporter relais et réconfort. Avec le confinement les mamans vont être plus vulnérables à cause de l’isolement.»

A l’inverse, est-ce qu’on peut noter des effets «positifs» de ce confinement ?

« L’institut Matern’Etudes a fait une étude sur 30 femmes ayant accouchées entre le 17 février le 2 avril. Ce qui ressortait le plus, c’était les informations trop floues et tardives, démêler le vrai du faux, l’absence du conjoint jugée traumatique. Un sentiment ambivalent entre tristesse et moment privilégié, une espèce de fusion, certaines mamans apprécient le côté « bulle » sans les agressions du monde extérieur. Après cela dépendra fortement du contexte familial, je pense que le confinement peut exacerber certaines situations. Si la jeune maman a un passé de blessures émotionnelle, de faible estime d’elle-même, une hypersensibilité, peut-être qu’elle va vivra les choses de manière beaucoup plus intense. Donc tout dépendra de la personnalité de la maman. Si le couple est très solide et se soutient, cela va aussi jouer.»

A quel moment, on fait la distinction entre baby-blues et depression post-partum ?

«Le baby-blues est censé durer une semaine, dix jours maximum. Quand le mal-être persiste au-delà de deux semaines, ce n’est pas normal. Si on ressent toujours un sentiment de tristesse, de désarroi, si on commence à avoir des pensées trop culpabilisantes ou des angoisses disproportionnée. Enfin s’il y a une absence de plaisir dans les soins, des troubles alimentaires…, il faut consulter. En parler, ne pas s’isoler, demander de l’aide. Souvent, c’est la sage-femme qui est le relai.»

Quelles répercussions pour les femmes qui ont accouché seule, sans leur partenaire ?

« Je pense que c’est vraiment important qu’elle fasse la démarche d’un suivi psychologique. Parfois, on a tendance à minimiser, à relativiser. Bien sûr, je suis pour la pensée positive, mais je pense qu’il faut aussi, pour accepter les choses et avancer, accueillir ses émotions, leur laisser une place, pour pas qu’elles ne se figent et que la maman puisse traverser les choses avec plus de facilité.»

Ne pas avoir l’accouchement dont on rêvait peut avoir un impact sur la suite ?

« Oui, surtout il y a une fragilité émotionnelle, si on a idéalisé cet accouchement, la jeune maman peut avoir le sentiment qu’on lui a volé son accouchement, être frustrée, en colère. Et il ne faudrait pas que cette frustration ressorte sur sa relation avec son bébé ou avec son conjoint. Elle devra faire un travail sur elle-même pour ne pas refouler ses émotions.»

Et pour le partenaire qui ne peut pas assister à l’accouchement ou rester à la maternité ?

« Il peut aussi y avoir un sentiment de frustration, de colère et d’injustice, mais je voudrais les rassurer en disant que tout reste à faire. Et que la période de confinement à la maison permet de prendre davantage le relai et donc sa place de papa. C’est le moment idéal pour se positionner dans son nouveau rôle et de créer un lien d’attachement primaire de qualité. C’est vraiment important que les parents puissent mettre des mots sur leur vécu.»

Qui est Dalila Pilot ? Après plusieurs années d’expériences en institution et en milieu hospitalier, Dalila pratique à présent en profession libérale en région parisienne et en ligne. Son site internet : www.dalila-pilot-hammoud.com/


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Je m’appelle Sophie, je suis journaliste et l’heureuse maman d’un petit garçon né en octobre 2019. Après sa naissance, je me suis vite rendue compte que la grossesse ne s’arrête pas au bout de neuf mois. Car oui, il existe bien un quatrième trimestre, une période où la maman va avoir besoin de se reposer afin de récupérer et reprendre des forces. J’ai donc décidé de mettre mes compétences de journaliste au profit de cette thématique à travers un compte Instagram, un podcast et un magazine.

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